Marvel Universe #001 (VF – Panini Comics)

Si il y a bien un vilain qui risque d’envahir la scène médiatique d’ici quelques mois, c’est bien lui, Thanos le Titan Fou. Ce personnage concept iconique, autrefois antagoniste ultime des Vengeurs sous l’ère Starlin, il faut bien le dire, a légèrement perdu de sa superbe, en faute une exposition répétitive, d’Annihilation aux Ultimates d’Ewing, en passant par les numéros d’Aaron sur les origines discutables du personnage. Marvel Comics ne pouvait passer à côté de l’appel du pied du cinéma, voici donc la série Thanos, dont les six premiers épisodes sont publiés dans le format kiosque, une aubaine pour le lecteur estival. Et il y a de quoi tourner la tête, puisque Lemire, auteur à succès mérité, s’attaque au mythe funeste du Titan. 

Lemire nous plonge d’ailleurs rapidement dans la continuité récente de Thanos, après son détour entre les mains d’Ewing, du fait que ces 6 premiers numéros s’attardent finalement surtout sur Thane, son fils, créé par Hickman dans les pages du très bon Infinity. De très bon, il n’y a plus rien ici, Lemire est vide de toute substance, alors que le potentiel et les concepts autour de tels personnages sont immenses, car oui, Lemire ne raconte rien. En effet, d’un côté Thanos est mourant (son état d’Eternel devrait lui permettre un contrôle absolu sur ses cellules, mais apparemment … non) et de l’autre Thane, honteusement maltraité par Corvus Glaive dans les geôles du Quadrant Noir ne va pas chercher plus loin que vouloir la Mort de son père. Les enjeux ne s’envoleront jamais, et ce n’est pas une révélation finale en forme de parangon ailé enflammé qui relance un quelconque intérêt.

Mais en plus des ambitions limites et limitées du titre, Lemire rate le coche des dialogues. La série est bavarde, s’éternise à nous décrire les plans terriblement simplistes de l’un et ceux de l’autre, sans jamais chercher au delà. Mais là où Thanos reste à minima cohérent dans sa condition de bourreau cosmique, Thane, lui, stagne au niveau de l’enfant gâté, abusé par ses différentes rencontres. Le personnage est insipide dans ces pages, sans jamais atteindre la grandeur perverse de son paternel, un pauvre mioche pleurnichard, rien de plus. D’ailleurs, la conclusion du kiosque est particulièrement idiote, Thane en oublie même son objectif initial, tombe dans la facilité primaire sans grande subtilité. C’est d’autant plus dommageable que le principe même du personnage, tel que décrit dans Infinity, avec ce duo de pouvoirs au creu des mains, laissait présager d’une richesse absolue. En prime, Lemire abuse de lignes narratives insignifiantes, qui ne servent qu’à décrire ce qu’il se passe sous nos yeux, ou bien à déblatérer des généralités sur les génocides du Titan, ou ses capacités physiques hors du commun. La partie narrative est donc lourde, pesante et ne décolle à aucun moment sans proposer de réels concepts ou enjeux. 

Malheureusement, la partie graphique n’est pas en reste, Deotado s’associe à Lemire, et livre des compartiments de dessins. Et même si je n’adhère pas initialement à son style artistique, la série possède cependant, je pense, quelques lacunes illustratives. Comme de nombreuses autres œuvres signées Deodato, c’est avant tout la composition et le découpage qui dénotent. Ici, les pages sont réalisées sur un fond orange ou noir uni, puis l’artiste vient apposer ses cases et les entrecoupent avec de larges bandes géométriques. L’effet est particulièrement dérangeant, ne sert en rien le propos narratif (du moins je ne l’ai pas saisi) et vient seulement hacher certaines planches. En prime, un sentiment d’ébauche parsème les 6 numéros, les choix d’unifier les fonds et la colorisation n’aident pas à faire s’élancer le titre, d’une timidité artistique pénible. Cependant, la violence graphique clairement affichée, ainsi que certaines poses du Titan viennent nuancer un bilan graphique bien mitigé. Une certaine ambiance dark space opera se dégage quand même de la série, les personnages sont aux confins de l’univers, évoluent dans de sombres bases lunaires, traversent des planètes désertiques et voyagent dans de vieilles frégates ronflantes.  

Alors que la scène a tout pour plaire, je ne m’explique pas cette composition de page

Si on s’arrête à la première page, le sommaire est très alléchant, un vilain mythique aux possibilités démentielles, modelé par un auteur le plus souvent génial. Pourtant, une fois la lecture terminée, la déception est immense et l’impression de suivre une histoire de bas étage est bien là. Les personnages mis en jeu appellent à des idées qui n’arrivent jamais, le manque flagrant d’ambition du titre est particulièrement frustrant. Frustration actancielle sur laquelle vient s’ajouter un dessin sans réelle flamboyance, qui n’essaye jamais à défaut de se planter. La consolation, le choix de publication de Panini qui ne vous demandera que quelques euros. A ce prix là, vous pouvez peut être vous laissez tenter sans prendre trop de risques.

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