By Night (VF – Bliss Editions)

By Night
Date de Sortie
31 janvier 2020
Scénario
John Allison
Dessins
Christine Larsen
Couleurs
Sarah Stern
Editeur
Bliss Editions
Contenu
By Night #1-12
Format
320 Pages - Récit Complet
Prix
29,90€
La note de ComicStories
8.3

En parallèle des derniers numéros de Giant Days, John Allison a proposé chez Boom! Studios une série en 12 épisodes, désormais terminée, intitulée By Night. C’est ce projet que Bliss Editions nous propose de découvrir en ce début d’année, dans une jolie intégrale.

IL SE PASSE QUELQUE CHOSE D’ÉTRANGE À SPECTRUM, DAKOTA DU SUD.
Spectrum a arrêté de prospérer après la fermeture des usines de Charleswood, sa seule source d’activités. Dans cette ville en déclin, Jane retrouve son amie Heather, de retour de la fac, qu’elle avait perdue de vue après le lycée. Heather, fan d’exploration urbaine, embarque Jane en quête d’aventures dans la vieille usine abandonnée. Quels secrets se cachent derrière la disparition de son fondateur ? Quand leur escapade entraîne les deux amies dans une autre dimension, leur plan prend forme : réaliser un documentaire sur cet autre monde et devenir riches, vraiment riches. Le monde de l’autre côté du portail regorge de monstres, de magie et d’une opportunité pour une nouvelle vie. Il ne reste plus qu’à traverser…

Si vous vous êtes laissés prendre dans les filets de Giant Days, c’est sans doute à cause du talent de John Alison en matière de caractérisation et développement de personnages. Je vous préviens tout de suite: vous risquez d’accrocher à By Night pour les mêmes raisons.

Jane, et surtout Heather dans mon cas, vous paraîtront instantanément sympathiques et vous évoqueront forcément une personne de votre entourage. Allison est passé maître dans l’art d’amener le lecteur à s’identifier à ses personnages et réussit encore une fois son coup. Immédiatement, j’ai eu envie de savoir qui elles étaient et de connaitre les raisons d’une possible rancœur entre les deux jeunes femmes. Mais les personnages féminins ne sont pas les seuls à être géniaux. Le cast masculin, emmené par Barney, Gardt, ou encore le père de Jane, est également très réussi. Plus que d’écrire de très bons personnages qui cohabitent dans la même histoire, tout le talent de John Allison réside dans les liens qu’il tisse entre eux au fil de l’histoire.

L’ambiance qui règne à Spectrum, cette ville qui refuse de passer le cap de la fermeture des usines de Charleswood et semble vivre dans un passé qu’il faudrait oublier pour aller de l’avant, est particulièrement bien dépeinte. Charleswood a tout de l’entreprise douteuse qui sert de couverture à des opérations louches, à la tête de laquelle se trouve un patron mystérieusement disparu, Chet Charles, scientifique dépassé par l’ampleur de sa découverte. Alors qu’il devrait nous paraître antipathique, la façon dont il est décrit par les habitants de Spectrum et par le scénariste en fait finalement un personnage fascinant et plus pathétique que vraiment méchant.

Bien sûr, By Night est un récit de science fiction, qui nous parle d’une dimension parallèle révélée par un appareil fonctionnant uniquement la nuit, alimenté par les « rayons » lunaires. Et des créatures qui vivent de l’autre côté, parmi lesquelles le génial Gardt, aussi drôle (malgré lui) que touchant. De l’autre côté, c’est l’inconnu et le danger, toute une faune et une flore jusque là inconnues de notre monde. Et Jane voit là l’occasion d’enfin réaliser ce documentaire qui la rendrait riche et dont elle rêve depuis longtemps. Poussée par Heather, son amie surgie du passé et passionnée d’exploration urbaine, à l’origine de la virée nocturne qui leur a permis de découvrir ce monde, elle se lance dans ce projet fou et entraîne avec elle Barney, son collègue de travail, et son père. Ensemble, ils vont affronter les plus grands dangers, et percer des secrets enfouis dans le passé de Spectrum. Mais By Night, c’est avant tout une histoire d’humains.

L’histoire de ce que l’on se rêve devenir lors de la remise des diplômes, et de ce que l’on est réellement quelques années plus tard. Une histoire d’ambition de grand cinéma documentaire que l’on finit par étouffer, et de l’acceptation (ou non) de cette vie, alors que l’on se retrouve à nettoyer des tubes à essais dans un laboratoire de chimie. L’histoire de cette partie de soi que l’on cache, de ces sentiments que l’on n’exprime pas, de cette impression de passer à côté de sa vie, et de ce qui, parfois, par le biais d’une amie oubliée, provoque une nouvelle étincelle. Dans Giant Days, John Allison nous raconte une histoire d’amitié très forte, là où By Night nous parle d’une amitié effacée par le temps et la distance, de nostalgie… et de retrouvailles.

Rassurez-vous, malgré ses thèmes, ce récit n’est pas déprimant une seconde, ni ennuyeux. Au contraire, il s’agit bien d’un récit de science fiction et d’aventures mené tambour battant, l’humour est particulièrement présent (et parfois piquant), et on se trouve rapidement embarqué dans des aventures très divertissantes. Notamment grâce à Gardt, personnage central de « l’autre côté ».

Graphiquement, il m’a fallu un ou deux épisodes avant d’être réellement saisi par le talent de Christine Larsen, et on aurait tort de s’arrêter à la simplicité apparente de ses dessins. Ses personnages sont particulièrement expressifs, notamment dans le regard, le monde qu’elle met en scène « de l’autre côté » est foisonnant, et elle possède un réel sens du mouvement, rendant ses compositions très dynamiques. Sarah Stern, qui oeuvre à la colorisation, doit elle aussi être mentionnée, tant sa maîtrise absolue de la lumière m’a bluffé. Ensemble, les deux artistes livrent un travail de toue beauté, qui fait bien plus que simplement rendre service au scénario.

En conclusion By Night est un paquet de bonbons que vous consommerez avec gourmandise et sans pouvoir vous arrêter. Mais attention, savourez-le, car douze épisodes, c’est court, et une fois l’album refermé, on en redemanderait bien une tournée, qui pour le moment n’est pas prévue.

8.3
Giant Nights!
On aime
Le développement des personnages
L'humour parfois piquant de John Allison
Le style graphique
On aime moins
La frustration de quitter aussi vite ces personnages