Jamais à court de bonnes idées, Akileos va régulièrement chercher des titres qui marquent par leur originalité. Emma Wrong, réalisé par les italiens Lorenzo Palloni et Laura Guglielmo, entre dans cette catégorie.
Janvier 1951, désert du Nevada, trois jours avant le premier essai nucléaire sur le sol américain, le cadavre d’une femme flotte dans la piscine d’un motel situé à quelques kilomètres du site de lancement…mais Lorenzo Palloni se détourne de ce pitch de départ pour nous conter une histoire mêlant amour et espionnage. Emma est à la recherche de son amour, lui-même espion, qui a disparu. Pour cela, elle décide d’employer les méthodes de l’homme qu’elle recherche en enquêtant dans un motel où se croisent divers personnages haut en couleur.
Emma Wrong est d’abord un polar haletant que l’on suit avec avidité. Les retournements et les fausses pistes sont légion et efficaces. L’on cherche à démêler le faux du vrai dans l’enquête d’Emma jusqu’à la révélation finale qui surprend encore. A l’instar des pensionnaires du motel, l’on se demande également qui est Emma, dont la personnalité nous apparaît trouble à travers ses agissements et l’évocation de son passé par des flash-backs. Dans le déroulé et le suspens, on pense au cinéma d’Hitchcock, même si les chassés-croisés peuvent être un peu redondants.
Lorenzo Palloni développe ses personnages en les encrant dans l’époque. 1951, c’est la guerre de Corée – Emma Wrong est d’origine asiatique -, et la ségrégation envers les noirs. Les préjugés et le racisme ordinaire sont passés à la moulinette. Chaque individu a une personnalité propre avec ses réactions aux événements. Les couples sont croqués sous l’angle de la jalousie envers cette sublime Emma. La peinture est féroce. Cela évoque le contexte de nombre de romans d’Agatha Christie.
L’amour d’Emma pour son espion disparu est présenté sous une forme originale, à travers des lettres qu’elle lui écrit et qui montre une obsession totale. Jusqu’au boutisme qui pourrait lui être fatale lorsque la guerre froide et ses espions sans scrupules s’emmêlent.
Emma Wrong, c’est aussi une palette graphique de toute beauté. Les compositions rappellent des classiques du cinéma américain. Le choix des couleurs dans tes tons bleus et orangés permet, là aussi, une originalité sans pareille et une évocation des lieux où se déroulent l’action : entre l’eau de la piscine qui rafraîchit au milieu de ce désert de feu inquiétant. Les gros plans, les cadrages accentuent le suspens et la tension. Certains plans comme la femme morte dans la piscine font penser inévitablement aux peintures de David Hockney. Une partie graphique référencée qui séduit totalement.
