Forte de ses Eisners de la meilleure nouvelle série et du meilleur artiste digital, Invisible Kingdom a débarqué à l’automne 202O chez HiComics, toujours à la pointe sur les séries indés à ne pas rater ! Petit rattrapage sur le tome 1 de cette série de SF scénarisée par G Willow Wilson et dessinée par Christian Ward.
Vess est une jeune « non-un » tout juste initiée et dévorée par une foi inébranlable dans l’enseignement de la Renonciation. Pilote de fret aguerrie au service de la méga-corporation Lux, Grix est son antithèse. Elle trace sa route de planète en planète, épaulée par un équipage téméraire. Tout bascule quand Vess, récemment nommée scriptorienne, et Grix, plongée dans son inventaire, tombent sur une information explosive…
G Willow Wilson imagine un monde dominé par une corporation nommée Lux qui a édifié un empire financier colossal grâce à un système de livraisons entre planètes. Cet univers n’est pas sans faire penser au nôtre, basé sur des habitudes consuméristes. En opposition à Lux, un courant religieux, appelé L’église de la Renonciation, prône le renoncement à toute possession physique au profit d’un Royaume Invisible.
L’autrice développe ces deux pans de son histoire au travers de deux héroïnes – Vess et Grix – aux caractérisations étoffées et assez opposées, même si elles ont toutes les deux en elle une forme de rébellion qu’elles expriment de façon différente. La première a renoncé à son destin de « reproductrice » sur sa planète pour suivre le chemin de la Renonciation. G Willow Wilson parle de la foi et de la conviction sans juger et avec subtilité. La seconde mène son existence autonome avec force et indépendance, ne s’en laissant pas compter. A travers sa destinée, l’autrice évoque, sans concession, la servitude des individus au consumérisme débridé. Par le biais des liens obscurs entre les deux entités, l’autrice tisse également l’impuissance des gouvernants lorsque la corruption a conquis tous les niveaux de la société et la nécessité de livrer la vérité au grand jour. Bien que se déroulant dans un univers imaginaire, le miroir de notre propre monde est évident.
L’autrice conte également la capacité à changer de ses personnages. L’influence de l’une sur l’autre et réciproquement les guide sur des chemins nouveaux qui vont lier leurs destins respectifs. L’autrice n’en oublie pas de livrer une intrigue haletante non avare en action et en rebondissements. G Willow Wilson amène une vraie tension qui monte crescendo et imagine quelques scènes d’action spectaculaires qu’illustrent à merveille Christian Ward. Car on ne peut évidemment dissocier le plaisir de lecture de Invisble Kingdom du travail souvent époustouflant de l’artiste.
Ce dernier démontre tout son talent pour imaginer un univers où vaisseaux et planètes s’enroulent dans un tourbillon de couleurs, où les designs des personnages invitent au voyage, où les surfaces de planètes sont d’une folle inventivité. Demeurent toutefois quelques planches moins agréables pour les yeux avec des silhouettes parfois très irrégulières qui tranchent avec le reste.
Invisible Kingdom offre un univers de SF flamboyant qui mêle réflexion et divertissement, splendidement illustré par un Christian Ward en grande forme !