Kill or be killed – tome 4 (VF-Delcourt)

Kill or be killed - Tome 4
Date de Sortie
6 février 2019
Scénario
Ed Brubaker
Dessins
Sean Phillips
Colorsiation
Elizabeth Breitweiser
Editeur
Delcourt
Prix
16,50 €
La note de ComicStories
10

A l’ouverture de ce dernier tome de Kill or be killed, la fébrilité m’a gagné. D’abord parce que cela constituait les derniers moments passés à découvrir des épisodes de cette série, qui pour le moment a réalisé un sans faute et parce qu’Ed Brubaker et son duo d’artistes ont su mettre la barre tellement haut que l’idée d’une conclusion ne serait-ce que mi-figue, mi-raison se serait avérée être une déception.

Suite aux découvertes faites sur sa famille dans le tome 3, Dylan tâche tant bien que mal de reprendre une vie normale mais il est toujours tourmenté par ce démon. Suite à un coup de folie, il se retrouve interné dans un hôpital psychiatrique. Pendant ce temps, à l’extérieur, des éventements vont précipiter les choses quant à sa décision de devoir se délivrer de ces tourments.

Dylan a une vision du monde toujours plus sombre et ce n’est pas ce qui se passe dans l’hôpital psychiatrique qui va améliorer les choses. Sa volonté d’en finir avec ce démon est claire et il multiplie les pistes pour s’en sortir. Celle qu’il finit par choisir va faire basculer définitivement le récit. Ed Brubaker doit se diriger vers la fin de sa série et le moins que l’on puisse dire, c’est que rien n’est laissé au hasard ! Hors de question de bâcler sa sortie ou d’en proposer une fin banale.

L’étude de la psyché du personnage est toujours aussi riche : à travers ces actes, sa vision du monde ou la narration employée. Le narrateur est toujours Dylan s’adressant au lecteur avec une certaine familiarité, le considérant comme un contemporain, au fait des événements qu’il conte. Ce choix renforce le caractère psychiquement perturbé de Dylan.

Ed Brubaker décrit un monde de fin de civilisation, perverti de toute part. Que cela soit individuellement, pour la satisfaction de plaisirs pervers et prohibés ou l’appât du gain, ou collectivement, de façon aveugle, pour un profit méprisant jusqu’à la survie de l’humanité. Rien ne semble vouloir laisser transparaitre une once d’espoir. Dylan s’engouffre sur ce chemin sans retour qui lui permet de justifier ses actes. Une pâle imitation de l’homme au masque rouge, qui terrorise la ville en s’attaquant à du menu fretin, renforce Dylan dans son idée. Moralement condamnable, sa quête de justice en devient presque  évidente.

Le scénariste avait bâti le portait de l’inspecteur Sharpe, jeune femme droite et déterminée, dans un précédent tome. Sa réapparition s’intègre parfaitement à une fin pleine de tension. A la suite de découvertes cruciales, elle finit par rencontrer Dylan, permettant à celui-ci de se libérer enfin. Les deux forment alors un duo où les rôles s’inversent : la fragilité de Sharpe survient, permettant à Dylan d’endosser le costume de héros. Ces dernières scènes, totalement maitrisées par le scénariste, sont magistrales.

Ed Brubaker choisit alors de nous proposer une fin en jeu de pistes. A pitch initial peu réaliste, fin hors du commun oblige. Dyaln nous narre plusieurs fins possibles à son histoire. Celle où il reprend le cours de sa vie est bluffante de crédibilité alors que l’idée parait inconcevable. L’on se dit alors que Brubaker est culotté ! Mais la pirouette qui survient nous emmène sur une autre piste, qui semble plus classique. L’on se dit alors que Brubaker n’ose pas assumer. Et là, il nous achève avec une dernière séquence qu’on n’a pas vu venir ! C’est magistral !

Graphiquement, Sean Phillips et sa complice Elizabeth Breitweiser sont toujours au sommet de leur art. Les scènes se déroulant sous le blizzard avec cette neige qui tombe à gros flocons sont sublimes. Pleines pages magiques, découpages originaux, demi-pages bordées de prose sont, comme dans les tomes précédents, au rendez-vous ! La précision du trait du Phillips ne s’est jamais autant fait jour, notamment dans la conception des décors, et la colorisation de Breitweiser est toujours impeccable, en particulier dans le choix des teintes, ne noyant jamais les dessins du complice de toujours de Brubaker.

Dire que cette conclusion était attendue est un euphémisme ! C’est un sans faute que réalisent Brubaker, Phillips et Breitweiser, hissant Kill or be killed au rang de chef d’œuvre!
10
Indispensable
On aime
Une série toujours plus sombre, plus dure et tellement bien écrite
Une fin surprenante en jeu de pistes narratif
La partie graphique, toujours