Alors que Tim Seeley ramène Nightwing à Blüdhaven dans des épisodes irréguliers et un brin fades de sa série Rebirth, Urban Comics nous propose de découvrir de façon inédite en VF, la première série solo du personnage signée Chuck Dixon. Le scénariste décide d’envoyer Dick Grayson dans cette cité enquêter sur le mystérieux meurtre de 21 membres d’un gang, découverts dans l’estuaire de Gotham.
Chuck Dixon donne une orientation essentiellement action à sa série. L’intrigue démarre sur les chapeaux de roues, Nightwing coulant au fond de la rivière menotté à un réfrigérateur. Le ton est donné, le récit est engagé et ne nous laissera aucun répit, si ce n’est en refermant ce kiosque au bout des huit épisodes. C’est une des qualités de cette série : un rythme soutenu, sans temps mort. Dixon sait y faire. Il crée une ambiance de polar faite de flics ripoux et de mafieux, de gros flingues et de sabres, de cascades spectaculaires et improbables. L’enquête policière reste assez basique mais l’auteur y incorpore des personnages consistants tels le flic ambigu Dudley Soames ou la vilaine Lady Vic, dont c’est la première apparition.
Dixon profite de ce début de série pour incorporer les ingrédients qui constitueront le background : la couverture de Dick en serveur de bar, le logement peu confortable qu’il se dégote ou la mystérieuse concierge qui offre des séquences légères bienvenues et qui permettent au scénariste de glisser quelques messages sur les apparences et les préjugés. Tous ces personnages secondaires sont dotés d’une caractérisation crédible, travaillée et intéressante.
Même si Dixon n’atteint pas le niveau d’un Greg Rucka dans le style polar, l’ensemble est de bonne facture. C’est, rappelons-le, un comics de super-héros et c’est de ce point de vue un excellent compromis.
Le scénariste profite d’un épisode pour faire venir le second Robin, Tim Drake, dans une vingtaine de pages savoureuses. Une livrée faite d’humour, de respect et de belle complicité, un vrai plaisir. Ceux qui suivent la série Nightwing Rebirth verront que Tim Seeley a su s’inspirer de son pair.
Les dessins de Scott McDaniel sont typiquement de leur époque. Corps du héros bodybuildé, vilaine dotée d’une poitrine de concours, visages carrés, scènes d’action surchargées en détails nuisant parfois à la lisibilité. Les couleurs de Roberta Tewes viennent enfoncer le clou avec leur manque de subtilité.
Néanmoins, il y a réel travail de narration et de mise en page. Le dessinateur varie les cadrages et les formes des cases et use -abuse ?- de perspectives plongeantes abyssales. Il décompose certaines cascades du héros dans des cases verticales efficaces. Les gros plans ne sont pas en reste, offrant parfois des expressions exagérées.
Visuellement, c’est quand même agréable à lire malgré ces caractéristiques typiquement 90´s.
Urban comics nous offre donc 8 épisodes d’excellente facture agrémentés d’un travail édito encore une fois riche et qui replace bien la série dans son contexte, permettant au néophyte de ne pas être perdu. Chapeau bas à nouveau et cela pour 5,90€ ! Aucune raison de ne pas se laisser tenter !
Nightwing par Chuck Dixon, c’est du bon comic-book de superhéros, divertissant et bien fichu. J’ai désormais fébrilement envie d’aller lire la suite. Malheureusement, à l’instar des précédents kiosques « vintage » tels le Superman de Joe Kelly et Jeph Loeb, il est peu probable qu’on ait la suite ou alors au mieux une seconde livrée. Dommage. Néanmoins, on pourra trouver en VO l’intégralité du run de Dixon en cours de réédition.
Un kiosque au rapport qualité-prix exceptionnel et une belle initiative de la part d’Urban Comics. Pour ne rien gâcher, c’est un vrai plaisir de lecture !