Komics Initiative a la bonne habitude de proposer des œuvres variées et pertinentes. C’est peut-être plus que jamais le cas avec Windows on the world, Graphic Novel écrit par Robert Mailer Anderson et Zack Anderson, et illustré par Jon Sack, artiste coutumier des titres engagés.
Balthazar, un père de famille mexicain, décide, devant l’accumulation des dettes, de partir aux USA en quête d’un meilleur salaire. Il travaille alors dans les cuisines du Windows on the world, célèbre restaurant situé au sommet d’une des tours du World Trade Center, lorsque les avions s’abattent le matin du 11 septembre 2001. Inquiets devant l’absence de nouvelles de leur père, les membres de la famille finissent par se résigner jusqu’à que la mère ait une hallucination qui lui révèle que son mari est toujours vivant. Fernando, un des fils, part alors aux USA, en quête de son père. Débute alors un long et difficile périple.
Contrairement à ce que l’on peut imaginer, les attentas du 11 septembre ne sont pas le cœur du récit proposé par les auteurs mais bien une sombre toile de fond pour aborder une multitude de thèmes. De l’annonce brutale des attentats à l’achèvement de la quête de Fernando dans les rues de New York, les auteurs évoquent l’âpre vie des travailleurs immigrés, le racisme endémique d’une partie de la population américaine, mais aussi la solidarité, le rôle de la famille et le regard que l’on porte sur soi.
Tout commence par le long périple qui amène Fernando jusqu’aux frontières des USA puis jusqu’à la Grosse Pomme, caché à l’arrière d’une camionnette, arpentant, en compagnie de familles, les étendues désertiques du sud du pays ou trouvant un accueil solidaire en cours de chemin. Puis vient la difficile recherche de son père où Fernando va se frotter aux New-yorkais, entre racisme, violence, solidarité, résilience et amour.
Les auteurs écrivent des scènes extrêmement fortes où les messages se glissent avec finesse et justesse. Le lecteur, happé, est régulièrement ému, surpris, choqué. Et lorsque Fernando touche enfin au but, ce qu’il découvre le trouble et perturbe ses repères. Les auteurs livrent alors un regard puissant et inattendu sur l’estime de soi et le poids du regard des autres. La relation de Frenando et de son père s’en trouve modifiée avec comme point d’orgue une forme de passage de témoin.
Jon Sack produit un noir & blanc très précis qui livre des émotions fortes avec aisance. Son storytelling mène parfaitement le récit et ses décors, aussi bien urbains que dans les espaces ouverts du Mexique ou Sud Etats-Uniens immergent totalement le lecteur. Au final, le noir & blanc traduit idéalement l’âpreté du récit.
Windows on the world est un récit extrêmement puissant et émouvant par la justesse et la richesse de son propos. Avec en toile de fond le drame du 11 septembre 2001, les auteurs parlent de thèmes universels auxquels le noir & blanc de Jon Sack apporte une force incroyable ! Essentiel !