Kill or be killed – tome 1 (VF – Delcourt)

Kill or be killed - tome 1
Date de Sortie
24 janvier 2018
Scénario
Ed Brubaker
Dessins
Sean Phillips
Colorisation
Elizabeth Breitweiser
Editeur
Delcourt
Prix
16,50 €
La note de ComicStories
9.9

Avec Kill or be killed, Ed Brubaker, Sean Phillips et Elizabeth Breitweiser reviennent rapidement en VF après le superbe Fondu au noir paru il y a à peine 2 mois. Loin de nous l’idée de s’en plaindre, le trio réalisant habituellement des merveilles.

Dylan, un étudiant dépressif et suicidaire, vit dans le même appartement que Mason, un ami qui lui-même s’est mis en couple avec Kira la meilleure amie de Dylan. Pour ne rien arranger, Dylan est amoureux de Kira et il leur arrive de se rapprocher d’un peu trop près de temps en temps. Situation un peu trop compliquée à gérer pour un dépressif suicidaire. Dylan décide de passer à l’acte mais en réchappe miraculeusement. Il s’aperçoit alors qu’il tient réellement à la vie. Dans la nuit qui suit, il est abordé par un démon qui lui propose un marché : il continuera à vivre s’il tue une personne par mois, une personne qui mérite de mourir ! Dylan est incrédule, croyant à une hallucination. Mais un mois plus tard, il tombe malade à en crever. Acculé, effrayé et bien décidé à vivre, Dylan accepte le marché du démon. Mais à quel prix !

On est loin du polar classique que sublime habituellement l’équipe artistique par sa reconstitution d’époque ou son contexte science-fictionnel. Le pitch est nettement moins abordable qu’à l’habitude. Ed Brubaker choisit d’imposer Dylan comme narrateur. Celui-ci nous décrit l’évolution de son état d’esprit. En cherchant sa première victime potentielle, il va se demander si une personne mérite de mourir lorsque son crime est odieux. Ici, Brabuker choisit d’évoquer la pédophilie. Le caractère innommable du forfait ne laisse pas la place au doute mais mérite-t-il la mort pour autant ? Quelle position a alors l’exécuteur, d’autant plus s’il a une santé mentale fragile comme Dylan ? Autant de questions que se pose Brubaker.

Le scénariste présente un personnage torturé, au passé familial lourd et qui trouve dans ce nouveau rôle un moyen de se réaliser. Tout doucement le personnage bascule. Il en vient à élaborer de façon structurée son nouveau rôle et les conséquences de son premier meurtre vont le conforter.

En parallèle, le scénariste fait évoluer la relation de Dylan avec Kira. La construction de leur enfance respective à l’équilibre précaire leur fournit une sorte de point commun qui les rapproche. La description de leur relation complexe où Kira tend à mener la danse et Dylan a avoir le rôle de « petit garçon » permet de faire également évoluer la psyché de ce dernier et ne l’aide pas à conserver un quelconque équilibre.

Le choix de narration par le personnage principal permet de bien décortiquer son évolution psychologique et de le voir basculer lentement. On pourra néanmoins la trouver parfois un peu bavarde. Les dialogues sonnent par contre très justes.

La narration visuelle est impeccable. Sean Phillips utilise le procédé d’un gaufrier amputé d’une ou deux cases superposé avec une pleine page, l’action se déroulant à la fois dans les cases et dans la pleine page. Il avait déjà utilisé cette mise en page dans Sleeper mais avec une disposition des cases plus déstructurée. Les auteurs proposent par contre, de façon inédite, des doubles pages faites de grandes cases centrales encadrées par des fonds blancs où se déroule la narration. En termes de dessins, le duo Phillips-Breitweiser réalise à nouveau un travail mémorable, peut-être même plus épuré qu’à l’habitude, notamment au niveau des couleurs où la coloriste sait s’adapter au ton de la série. C’est franchement un pur bonheur !

Kill or be killed s’impose immédiatement au niveau graphique. Scénaristiquement, les thèmes abordés en font un comics qui s’aborde avec moins d’évidence. C’est sans doute l’histoire la plus sombre du scénariste. J’avoue avoir eu un peu de mal à rentrer rapidement dans l’histoire, sans doute en raison de la narration évoquée précédemment. Néanmoins, une fois l’intrigue lancée, Kill or be killed s’impose comme un comics original et fort, ce que le tome 2 viendra sans doute confirmer !

L’édition de Delcourt un peu chiche en bonus, notamment en comparaison d’autres titres similaires chez d’autres éditeurs. Trois illustrations et puis c’est tout !

Malgré une narration un poil bavarde, Kill or be killed est un comics fort et original de par les thèmes complexes et délicats abordés. Sans doute l’œuvre la plus sombre de Brubaker. Côté dessin, Phillips et Breitweiser régalent encore!
9.9
Excellent
On aime
Un thème original
Une maitrise narrative impressionnante
Une partie graphique exceptionnelle
On aime moins
un poil bavard