Après avoir révolutionné le genre super héroïque dans les années 80 et redonné ses lettres de noblesse au genre polar en BD avec Sin City au début des années 90, Frank Miller sort en 1998, de façon surprenante, 300, sa vision de la bataille des Thermopyles qui a vu s’affronter 300 soldats Spartiates menés par Leonidas et l’armée surpuissante de Xerxès en 480 avant JC.
Vision personnelle contestée
S’inspirant de la Légende de la bataille des Thermopyles, Frank Miller livre une version spectaculaire et personnelle qui met en valeur les notions d’héroïsme et de sacrifice. L’auteur a affuté son regard sur le concept du héros au fil de ses œuvres des années 80 et impose un point de vue qui interroge les systèmes démocratiques et les batailles pour les idéaux, tout comme l’écriture de l’Histoire, tout en valorisant une vision idéalisée des guerriers, basée sur la camaraderie et l’héroïsme poussé à l’extrême. Tout en faisant fi de vérités historiques, Frank Miller donne une vision subjective assumée dont il s’est justifié à plusieurs reprises dans des interviews. La question de l’homosexualité des guerriers et celle du point de vue subjectif donné par un auteur à son œuvre ont été fréquemment questionnés. La préface du traducteur Yann Graff est sur tous ces points extrêmement éclairante.
Expérimentation graphique
Malgré ces points discutables, il est indéniable que Frank Miller impose une puissance impressionnante à son récit. Pour l’amoureux d’art séquentiel, ce qui marque avant tout est la proposition graphique de Frank Miller. L’artiste compose de véritables tableaux se déployant horizontalement en des doubles-pages époustouflantes qui offrent une narration incroyable. Chaque double-planche rythme remarquablement le récit dont la tension se fait de plus en plus palpable à mesure que l’histoire avance. Lynn Varley revient travailler avec Frank Miller depuis que celui-ci a adopté son nouveau style sur Sin City et le résultat est grandiose ! La coloriste apporte une majesté supplémentaire aux planches du dessinateur ! Une merveille graphique !
Un travail de narration impressionnant
D’un point de vue narratif, Frank Miller adopte Leonidas comme narrateur. L’implication de ce chef incontesté rend encore plus palpables les valeurs que souhaitent mettre en valeur le scénariste. Les choix de narration comme les scènes de la jeunesse de Leonidas qui ouvrent et closent le récit, la présence du conteur Dionos qui narre les légendes Spartiates ou les séquences vues par le regard de Leonidas sont autant d’idées narratives qui ajoutent une force supplémentaire au récit.
Fort de son imposante expérience Frank Miller réalise un travail narratif et graphique époustouflant !
Huginn & Muninn propose une version classique à couverture souple et proposera une version cartonnée en format à l’italienne le 19 janvier prochain.
Frank Miller livre avec 300 une vision personnelle de la bataille des Termopyles, incontestable réussite graphique et narrative !