Après la claque du premier tome, Urban Comics a décidé de torturer le lecteur en mettant un temps fou – un an ! – à sortir le deuxième tome de Gideon Falls.
Norton Sinclair et le Dr Xu tentent de rassembler les pièces du puzzle lié à leurs visions et en parallèle, le père Fred continue d’enquêter en compagnie du shérif Clara, au sujet de la disparition du frère de cette dernière. Les deux trames vont irrémédiablement se rejoindre dans un épisode #11 totalement hallucinatoire.
Jeff Lemire poursuit son impeccable construction, mystérieuse et inquiétante. L’édification palpitante et addictive à la façon d’un thriller mystique au suspens insoutenable happe le lecteur dès la première page et ne le lâche jamais. Intégrant des pans du passé qui enrichissent les questionnements du lecteur, Jeff Lemire sème les indices qui laissent penser ce que le lecteur suppute depuis le début : les deux trames sont liées et vont se rejoindre. Le frisson qui gagne le lecteur tournant chaque page, notamment à partir de l’épisode #10, devient délectable.
Le parallélisme des deux intrigues se traduit alors de façon définitive dans la partie graphique. Si le travail d’Andrea Sorrentino est, depuis le début de la série, exceptionnel d’inventivité et de créativité, l’artiste franchit un cap dans cette dernière partie de tome où l’expression du scénariste se traduit sous nos yeux. Des cases de formes diverses s’enchevêtrent en des formes géométriques délicieuses, des images se décomposent sous forme de puzzle, des planches se lisent verticalement ou à l’envers. Le lecteur est hypnotisé par ces graphismes sublimes.
Puis vient l’épisode #11 qui est celui du basculement où les destinées vont être chamboulées (à jamais ?). Jeff Lemire surprend à nouveau le lecteur, le laissant impatient de lire la suite. Le rythme est sans temps faible et maintient le lecteur en haleine, d’un bout à l’autre de ce tome. Le scénariste n’a sans doute jamais écrit d’histoire où la tension et le suspens sont poussés à ce point à leur limite.