L’exécuteur – Tomes 1 à 3

L'exécuteur
Scénario
John Wagner
Dessins
Arthur Ranson
Editeur
Delirium
Prix
20€ - 24€
La note de ComicStories
10

Quelques centimètres de poussière recouvraient les deux premiers tomes de L’Exécuteur dans ma bibliothèque. Une petite séance d’époussetage plus tard, vêtu d’un uniforme de soubrette des plus seyants, voici que les deux merveilles se redécouvrent à moi ! La soirée passée à dévorer ces deux pépites, je me retrouve comme par magie chez mon libraire, le lendemain, m’enquérir du tome 3 et achever, dans la foulée, cette trilogie magique ! 

Vous l’aurez compris, j’ai détesté L’Exécuteur – Button Man en VO – série britannique de John Wagner et Arthur Ranson. Dans notre beau pays, c’est Delirium qui s’est occupé de mettre en valeur, dans de superbes éditions, ce thriller sculpté à la lame de rasoir ensanglantée.

 

 

Tome 1 – Le jeu mortel

L’histoire se déroule en Angleterre, dans les environs de la capitale. Harry Exton est un ancien mercenaire rangé des voitures à qui un vieux pote propose d’intégrer un « jeu » où ses compétences de tueur professionnel vont lui permettre d’amasser un paquet de blé mais où la mort rôde à chaque instant. Tels des gladiateurs modernes, ces tueurs se livrent des joutes armées où les paris de riches individus vont bon train. Ces derniers, surnommés les « voix« , car on ne les contacte que par téléphone, ont chacun un ou plusieurs poulains appelés « exécutants« . Ayant récolté une belle somme et lassé, Harry souhaite arrêter…mais il n’est pas facile de quitter le « jeu ». 

La mise en place de ce pitch pas comme les autres se fait sans round d’observation et plante immédiatement le décor. On comprend de suite qu’on n’est pas dans une histoire pour fillettes. Le monde que décrit John Wagner est sans morale. Un univers où la vie humaine n’a que peu de valeur. Tout n’est qu’histoire d’argent et de plaisir pervers à observer ces hommes s’entre-tuer. Harry est un type qui tue de sang froid, sans aucune hésitation ni aucun remord.  John Wagner lui fait prodiguer quelques exécutions qui font dresser les poils. Le rythme du récit, guidé par un Harry qui se fait narrateur, est sans temps mort. L’histoire s’avale d’une traite. Le scénariste laisse une grande part aux joutes auxquelles se livrent les éxécutants, instillant une tension qui monde crescendo et permettant au dessinateur Arthur Ranson de proposer un travail de mise en page redoutablement efficace. Les couleurs sont très sombres. Même les tons plus vifs restent très pales. Le style de l’artiste s’apparente à du photo réalisme, très précis et à l’encrage prononcé. S’il convient parfaitement au style du récit, il ne conviendra peut-être pas à tous les lecteurs. 

Un premier tome en guise de mise en bouche absolument bluffant et addictif. Même si l’on imagine aisément l’issue de cette première partie, le plaisir est immense et l’envie d’enchaîner avec la suite, irrépressible. 

Tome 2 – La confession

Harry a failli laisser sa peau à la fin du tome précédent. Il se retrouve aux USA, où une « voix », Al Jacklin, qui souhaite qu’il devienne son exécutant, l’a recueilli et remis sur pied. Lui, qui souhaitait mettre fin à sa participation, se retrouve à nouveau embarqué dans cette aventure sordide, mais cette fois-ci, il est accompagné d’une jeune femme, employée par Jacklin, qui gère ses affaires et répond aux moindres de ses désirs – oui, tous ses désirs ! – et les joutes prennent une autre dimension. Harry va quelque peu déraper, enfreignant quelques règles et mettant les nerfs de sa « voix » à rude épreuve.

Dans ce deuxième tome, John Wagner transporte sa série et son héros aux USA. Les décors et les couleurs changent radicalement. Les grands espaces sont investis par le scénariste qui propose une joute en plein désert dans une sorte de vieux décor de Western, une course poursuite dans des paysages neigeux ou une chasse à l’homme dans les marais de Floride.  Le ton reste le même : thriller sans temps mort au suspens haletant. Harry, toujours alerte, s’aperçoit rapidement de la manipulation dont il est victime et va tenter de renverser la situation. Bien évidemment, ses adversaires sont de haut calibre et l’affrontement va être à la hauteur de nos attentes. La narration de John Wagner vient se parer de lettres rédigées par Harry, dont le but est de témoigner des événements dans le cas où il viendrait à disparaître. Le scénariste fait une nouvelle fois la part belle aux affrontements violents, permettant à Arthur Ranson de se faire plaisir.  Le dessinateur varie également sa mise en page, modulant la forme des cases, installant une tension incessante.

John Wagner décrit une humanité sombre dictée par le pouvoir de l’argent. La montée en puissance du récit atteint son paroxysme dans une scène finale sans concession où Harry semble avoir gagné la partie ! Un deuxième tome encore meilleur que le premier !

 Tome 3 – Les proies

Alors qu’il pense en avoir terminé avec le jeu en se construisant une nouvelle identité et une nouvelle vie, Harry va avoir affaire aux anciennes « voix » qui veulent se venger de celui qui leur a coûté beaucoup. John Wagner va alors construire une immense chasse à l’homme sur une centaine de pages.

La prouesse inimaginable est réalisée par John Wagner : tenir en haleine le lecteur avec cette traque à travers les Etats-Unis. Pas un seul instant, l’on a envie d’arrêter la lecture tant le rythme est infernal et la tension, insoutenable. Les multiples affrontements avec les exécutants engagés par les « voix » amènent des séquences violentes et cruelles. L’ambiance de thriller parano, avec ses twists inattendus, transporte le lecteur dans un véritable page-turner. Harry se fait fin stratège et John Wagner, malin dans la construction de son histoire. 

Arthur Ranson propose un mélange d’ambiances à mi-chemin entre les deux premiers tomes. Il mixe cadre urbain et grands espaces avec le même talent. L’affrontement final dure pas moins d’une trentaine de pages dans un enchaînement de morts violentes bien orchestrées.

Delirium propose, comme à son habitude, une superbe édition grand format avec un papier d’excellente qualité. Du beau travail !

Si vous voulez en savoir plus sur L’Exécuteur et ses auteurs, vous pouvez aller jeter une oreille à l’excellent podcast Comicsphere !

L’Exécuteur est un thriller original, aux multiples qualités scénaristiques et graphiques, dont le rythme d’écriture harponne le lecteur dès l’ouverture du premier tome jusqu’à la fin du troisième tome ! Chef d’oeuvre !
10
Indispensable
On aime
Un véritable page turner
Un scénario retors et malin
Un style de dessin qui colle au récit
L'édition de Delirium