On en rêvait, Urban comics l’a fait ! Tout d’abord relégué au grenier du faible magazine Suicide Squad dont il était le seul motif d’achat, Deathstroke a débarqué en librairie début 2018 ! La réputation de son scénariste et finalement sans doute la qualité de cette série ont convaincu le staff de l’éditeur de tenter le coup. Il faut saluer cette audace !
Deathstroke est un super vilain pas forcément hyper connu des lecteurs. Urban a pensé à nous en rédigeant un édito parfait qui replace l’essentiel de l’histoire du personnage et nous permet de ne pas être perdu.
Christopher Priest, dont la réédition de Black Panther n’est pas passée inaperçue, est un auteur connu pour ses scénarios travaillés et tortueux qui nécessitent une attention particulière de la part du lecteur. Cette nouvelle série ne déroge pas à la règle. Ce tome 1 est constitué de deux arcs. Dans le premier, Slade Wilson – Deathstroke remplit une mission de mercenaire mêlant dictateur d’un pays africain, interventionnisme américain, corruption. Dans le second arc, Wilson va chercher qui a mis sur un contrat sur la tête de sa fille Rose, elle-même mercenaire qui cherche un peu de quel côté elle se trouve.
Dans la première partie, Christopher Priest va alterner séquences passées de différentes époques et séquences présentes. La construction est complexe mais habile, nécessitant une attention soutenue. Chaque scène permet soit de replacer les événements de la vie de Wilson, caractérisant le mercenaire et ses proches, soit d’expliquer les événements présents. La trame présente, faite de machinations et de trahisons, est intéressante et pleine de rebondissements. Le cliffhanger attend une suite intrigante.
La seconde partie est de construction plus linéaire et contient des passages plus légers, notamment grâce à la présence de Damian Wayne qui fait étalage de sa répartie et de son caractère bien trempé. Son échange avec Wilson sous la plume de Christopher Priest est tout à fait délectable. Les rebondissements sont légion, la caractérisation de Batman est intéressante et ses échanges avec Ravager-Rose Wilson est bien écrite. En plus de Deathstroke, le scénariste développe deux personnages. Le premier, Wintergreen l’associé et ami de Wilson, fournit un contraste intéressant avec Slade Wilson par sa vision différente des choses et sa façon de les traiter. La seconde, Rose, est une « grande ado » qui ne connaît pas vraiment son père – et réciproquement – et se pose des questions. Les deux personnages permettent d’étoffer le récit.
Christopher Priest aime nous perdre, pour notre plus grand plaisir. Les morceaux de son puzzle s’assemblent petit à petit pour former un tout bien fichu. Les dialogues sont fluides et bien écrits. Le scénariste a fait ce qu’il faut pour que l’on soit familiarisé avec les personnages et nous a proposé deux intrigues intéressantes. On achève ce premier tome avec la satisfaction d’avoir eu une lecture dense, intelligente et divertissante.
Carlos Pagulayan et Joe Benett se partagent les dessins. Le premier propose un style mainstream de très bonne qualité, alors que le second alterne le bon et le moyen, livrant quelques planches nettement moins léchées. Néanmoins, l’ensemble présente une certaine unité, aidé par Jeromy Cox qui colorise tous les épisodes. Les deux artistes soignent les détails et élaborent une mise en scène classique mais efficace. Les scènes d’action sont dynamiques. L’utilisation de répétitions de cases associées avec une série de dialogues savoureux crée souvent des scènes assez drôles.
L’édition d’Urban Comics est de bonne facture avec un édito bien fait et essentiel, et une galerie de couvertures en fin de volume. Du bon boulot.
Deathstroke est une série originale, bien écrite, qui contient sa petite dose d’humour et qui demande toute l’attention du lecteur. Un plaisir de lecture !