The Delinquents (VF – Bliss Comics)

Les sorties Bliss Comics sont généralement des rendez-vous immanquables, avec des séries comme Blooshot, XO, Rai, Divinity ou encore Harbinger, le catalogue est impressionnant. Mais il restait encore deux univers sur lesquels je ne m’étais jamais penché : Archer and Armstrong, et Quantum and Woody. Le hic, ces deux séries sont en fait des réservoirs d’humour loufoque, parfois absurde, deux genres qui ne m’attirent absolument pas à l’écrit. Mais après une intégrale d’Archer and Armstrong et 3 tomes de Quantum and Woody, il est peut être temps de prendre le train en route. Il aura donc fallu attendre The Delinquents, une série écrite par James Asmus et Fred Van Lente, avec Kano aux dessins.

L’intrigue, simpliste au demeurant, n’est pourtant ni mauvaise ni inintéressante. Notre quatuor va devoir trouver la carte des Vagabonds tatouée sur le troufignon d’un quelconque chiffonier, ordre nomade auquel Armstrong est historiquement affilié (Armstrong est l’un des frères millénaires Anni-Padda, fraternité qui compte aussi Le Guerrier Immortel et Ivar Timewalker). Cet objet est au cœur de toutes les convoitises, puisque Mondostano, multinationale de l’agroalimentaire et de la génétique, missionne Quantum et Woody de le récupérer. Evidemment, les différents de chacun vont s’effacer, le quatuor s’allie pour contrer les fins morbides de ce géant pas si vert,  qui nous rappelle avec saveur nos grosses industries. Si j’en reste là, tout y est : humour à priori actuel et engagé, séquences absurdes et intrigue allégée, mais non moins valable, la fameuse chasse aux objets surpuissants. Une remarque, la continuité se fait parfois ressentir pour celui qui, comme moi, n’a jamais suivi ces personnages, certains points et références m’ont échappés. 

Je n’ai pas aimé du tout. Rapidement sur l’humour, cela tient plus de la plaisanterie, parfois balourde, parfois douteuse et seuls quelques formules éparses m’auront esquissé un sourire en coin. Cet abus, ce sur-abus même, de fantaisie dessert en plus un récit qui en devient totalement confus. Les quatre numéros se perdent dans une succession d’ellipses spatiales très embrouillées. Les auteurs ne parviennent pas à éclaircir l’imbroglio narratif plombé par un brouhaha gonflant et constant. Surtout que la fluidité n’est pas facilitée par une accumulation de dialogues mitraillettes bavards et trop souvent dissonants d’un protagoniste à l’autre. Ma lecture est totalement cacophonique, je n’ai absolument pas saisi la résolution finale avec les personnages, des bovidés humains végétaux (oui …) et une corne d’abondance vagabonde installée sur une mesa. Un joyeux bazar inaudible et incompréhensible, alors que le titre a pourtant quelques piqûres bien acides qui font mouches. Si des répliques comme « La nature, on en fait ce qu’on en veut » ou encore « Délibérément insérés dans des lois écrites par des lobbyistes et votées par un congrès corrompu » grincent, elles sont malheureusement trop disparates tout au long du volume. Il n’est pas impossible que je sois passé au dessus de la finesse humoristique du titre, mais pour l’instant on ne m’y reprendra pas. Cependant, la série, complète dans ce tome, peut être intéressante, notamment grâce à son artiste, Kano. 

The Delinquents peut faire valoir un dessin solide, inventif, aux compositions très étudiées. Kano c’est la mouvance des artistes types Samnee, Lieber ou encore Ramon Perez : un trait net, une colorisation en aplat de couleurs et surtout des agencements originaux. Et pour le coup, cela sert parfaitement les dialogues « tic-tac » des auteurs, les situations improbables, comme les décors. L’ambiance graphique du tome est totalement déjantée, mais cette fois, ne perd jamais en lisibilité. Ci-dessus, une des nombreuses pleines pages savamment étudiées en fonction du déplacement de Stano dans les couloirs namastés de son entreprise. Heureusement pour nous, cet exemple se retrouve tout du long, une vraie réussite graphique. 

N’ayant pas craqué pour Archer and Armstrong ni pour Quantum and Woody, me lancer dans cette série chorale était couru d’avance, et ce fut le cas : je n’ai pas aimé. L’humour absurde constant noie complètement l’intrigue, le titre bavard se perd dans un vacarme sans doute voulu mais très désordonné. Je ne retenterai pas ces deux univers Valiant. La série s’adresse donc aux lecteurs réguliers de ces personnages ou bien aux férus d’absurde et de loufoque. 

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