The Few (VF – Hi Comics)

Deuxième sortie de l’éditeur Hi Comics, The Few est totalement différent de Rick and Morty. Auteurs quasi-inconnus, récit de science-fiction au parti pris graphique radical, ce deuxième choix est culotté !

Dans un futur où l’eau et l’air sont devenus précieux, les États-Unis d’Amérique sont désormais fractionnés. Le gouvernement central, appelé le Palace, s’est débarrassé des États « inutiles » et règne par la terreur. Des rebelles, séparés en groupes qui s’opposent, tentent de lutter contre le Palace. Deux frères rebelles découvrent une femme qui semble fuir quelque chose au cœur d’une forêt. Elle tient contre elle un bébé. Ils décident de lui portent secours. Mais qui est-elle exactement ? Que faisait-elle dans cette forêt avec un bébé ?

Sean Lewis crée un univers dystopique où les relations humaines n’ont presque plus leur place. Chacun se méfie de son prochain, a adopté la violence comme mode de fonctionnement et l’espoir est une notion de plus en plus floue.

Le personnage principal est Edan Hale, la femme recueillie par les frères rebelles. C’est à travers elle que Lewis fait évoluer son récit. Il dépeint sa personnalité complexe et précise son rôle par petites touches, intégrant des flashbacks et utilisant le fantôme d’un personnage qui la hante. Le rythme des révélations permet de maintenir le suspense jusqu’au bout. La jeune femme est conditionnée et sûre de son rôle mais doucement, du fait des évènements et des rencontres, elle va se mettre à douter. Sean Lewis la rend attachante en lui faisant vivre des émotions que le lecteur ressent, que ça soit lorsqu’elle est soldat avec toute sa dureté ou fuyarde avec l’apparition de ses faiblesses. Sans aucun doute, la description de ce personnage est le point fort de The Few. Le scénariste aborde également la notion de pardon de façon intéressante.

Le personnage de Herrod, le très méchant rebelle, est également bien décrit dans sa folie meurtrière. Soutenu par un design effrayant, l’auteur réussit sa caractérisation. La personnalité des deux frères rebelles est un peu moins approfondie mais c’est leur présence et leur famille qui vont faire basculer le récit.

La violence est une composante primordiale de l’histoire où plusieurs camps s’entretuent. Les scènes d’affrontement sont dures dans un esprit Mad Max, avec motos et sabres, …Le monde utilisé par Sean Lewis n’est par contre pas très développé. On vit un peu le quotidien des rebelles mais très peu celui des habitants du Palace. Cette composante aurait sans pu être approfondie sans nuire au récit mais disons-le, le scénariste a voulu raconter l’histoire Edan et son évolution et non pas décrire un monde.

Aux dessins, Hayden Sheman est clairement un artiste très original au style que tout le monde n’appréciera pas. Néanmoins, c’est sans doute l’artiste idéal pour cette histoire. Son trait sec fait de hachures est parfait pour la description des paysages et des villes. Il retranscrit très bien la violence mais manque parfois de lisibilité dans certaines scènes d’action. On est de temps en temps un peu perdu par une narration confuse. Certaines pleines pages sont simplement magnifiques alors que certaines cases semblent inachevées. C’est inconstance est dommageable car cet artiste a vraiment une patte et je serais curieux de le voir à l’avenir lorsqu’il aura peaufiné son style.

La colorisation est également bien adaptée aux dessins avec ses tons crème et noir, de temps à autre complétés d’orange ou de vert. Néanmoins, elle est parfois basiquement utilisée dans certaines cases.

L’édition de Hi Comics est belle et très complète avec des couvertures et des croquis commentés par le dessinateur. Du bon travail.

The Few est donc un très bon récit qui s’attache à décrire la personnalité d’une femme qui évolue plutôt qu’un monde futuriste. C’est une grande réussite. Mais The Few est également une véritable aventure graphique orchestré par un dessinateur, certes inégal par moments, mais clairement à suivre !