Komics Initiative poursuit son exploration du Garth Ennis « confidentiel », après Caliban, Rover Red Charlie ou Les chroniques de Wormwood, avec Johnny Red The Hurricane, mini-série en huit parties dessinée par Keith Burns et inspirée de la série créée par Tom Tully et Joe Colqhoun et publiée dans le magazine Battle outre-manche, au cours des années 70, ainsi qu’en France dans trois beaux volumes chez Delirium.
En grand amoureux des récits de guerres et grand connaisseur du sujet, Garth Ennis propose une aventure épique qui pioche dans la réalité de la seconde guerre mondiale. En 2015, Tony Iverson acquière la carcasse d’un avion de modèle Hawker Hurricane MKII, en provenance d’Allemagne et qui aurait appartenu au légendaire Johnny Red. L’occasion de conter l’histoire de cet aviateur mémorable !
A l’instar du fantastique Sara, Garth Ennis place son histoire sur le front russe. Alors que la terrible bataille de Stalingrad fait rage, Johnny Red et son valeureux et singulier escadron vont être amené à prendre part à une mission secrète qui va mêler combats aériens, coups de poing bourrus, trahisons, coups tordus et rencontres inattendues. Mener de main de maitre, le récit se fait épique, dense et passionnant à suivre. Les classiques du genre sont convoqués : la lâcheté des gradés, le courage des hommes et femmes de terrain, le respect entre ennemis de même valeur. La façon dont les horreurs de la guerre sont décrites provoquent une forte émotion au lecteur, les auteurs ne versant jamais dans l’exagération gratuite. Si le déroulé pourra paraitre un poil classique, Garth Ennis sait ponctuer son récit de vraies surprises.
S’inspirant, comme très souvent, d’un contexte réel, Garth Ennis convoque un escadron 100% féminin qui offre un pan original à son récit. Mais c’est bien évidemment le personnage de Johnny Red, britannique aux commandes d’un escadron russe, qui est au centre de l’histoire. Un mélange d’un côté brut et d’une certaine subtilité en font un héros droit et fidèle qui ne manque pas de dire leurs quatre vérités aux gradés fourbes et prêts à sacrifier les hommes.
Mais Johnny est avant tout un aviateur hors pair que la réputation précède. Cela donne l’occasion à Keith Burns de proposer des planches sublimes. Grand amoureux des aéroplanes, l’artiste, s’inspirant de modèles réduits, réalise un travail bluffant de réalisme dans les compositions, quand bien même son trait demeure crasseux, élaborant des noirs époustouflants. Les combats aériens retranscrivent tout la violence des affrontements en conservant le côté majestueux du ballet des avions. Côté personnage, Keith Burns crée de vraies « gueules » qui s’engouffrent pleinement dans l’âpreté de la guerre. Jason Wordie complète parfaitement les dessins de l’artiste avec une palette de couleurs pales mais riches qui se marie idéalement avec les noirs de Burns.
On signalera enfin la très belle édition de Komics Initiative qui ponctue les chapitres d’articles décrivant des éléments de la guerre utilisés par l’auteur et propose en bonus de fin de volume des couvertures, des croquis, des interviews, …
Garth Ennis livre un récit de guerre original et passionnant que le dessin de Keith Burns rend unique grâce à ses superbes planches !