Le Caïd (VF – Panini Comics)

Des Champions, mais pas de papier cette fois. Donny Cates, Tom Taylor, Kelly Thompson, Mariko Tamaki, et de nombreux autres noms sont maintenant le quotidien de ce que sera, peut être, la Maison des Idées. Un futur concordant, très loin des apocalypses fictives souvent décrites, semble se dessiner. Matthew Rosenberg est l’un d’eux. Une punaise mise à l’oreille par d’excellents retours, prochain Caïd de l’industrie ? Du tronçon de réponse suivant : c’est le plus grand des criminels, oui mais c’est un gentleman. 

Wilson Fisk, dans une quête de rédemption (ni rouge, ni morte, pour l’instant) se lance dans l’écriture, ou plutôt dans la sous-traitance biographique. Sarah Dewey, ancienne pulitzer et journaleuse sportive maintenant, écope de la plume. En deux lignes, ce sont 5 épisodes résumés entièrement. La seule attente est celle de la sortie éventuelle du prochain best-seller. Matthew Rosenberg ne s’embarrasse pas d’un surplus de papiers-idées. Il se consacre pleinement à son histoire. Mais que se cache t-il derrière une telle économie de moyens ? En résumé là encore, des personnages cernés et l’articulation de non-dits. 

Les personnages, que l’auteur entoure d’une modernité distinctive, sont la première force de ce récit furtif. Forcément, Wilson Fisk, très éloigné de la brute épaisse, est indéfinissable, et durant toute la série. Tantôt citoyen modèle, tantôt concurrent mortel, tant de facettes qui se réfléchissent dans ces numéros. Le curseur fluctue, sans que le lecteur puisse choisir. Une mère honnête démontée par la vie, où le gout d’aventure, de justice et du risque se mêlent. Une véritable femme, avec ses emmerdes, ses déconvenues et ses réussites. Le choix final de Dewey pourrait bien redistribuer certaines cartes punaisées aux murs de l’administration new-yorkaise. Autour de ce duo, passent et repassent des têtes connues, cornues ou commotionnées, comme une note en bas de page.

Les portraits ne sont jamais uniques, mais divers et toujours indécis. Cette force du non-dit oratoire est appuyée par certains dialogues terriblement savoureux, mais surtout par un dessin. Une colorisation plus justement, puisque que le trait ne m’a pas enchanté au demeurant. La couleur clarifie parfois le trouble suspendu, ou vient le semer d’autant plus, le blanc et le noir ont toujours un sens, surtout ici.

Mais forcément, la hâte vers une fin imprévue se fait ressentir farouchement. Les dernières pages sont abruptes. Une ruade motivée par la pression d’un staff encore frileux pour les exercices différents. La jeune génération devra y remédier. Surtout que le rythme est étonnamment lent, et l’on se demande si l’auteur (mais lequel, Rosenberg, Dewey ?) arrivera à terminer sa publication. Une gestion de l’urgence ou du risque, ou des deux, que Marvel a encore du mal à négocier. Dommage, les lecteurs, comme l’équipe en charge en pâtissent. 

La bête à corne du récit soutient que « quand les méchants veulent quelque chose, ils délèguent », alors Rosenberg ose le diable, et se place directement en gentil parfait. Il utilise des personnages souvent captifs de leurs cadres, les en émancipe, en profite pour en créer des nouveaux, y associe une narration moderne et s’adjoint d’un visuel évocateur ou confondant. Le titre ne se hisse pas au sommet, la faute à une conclusion expédiée. Le Caïd est le cas idéal du tome unique à découvrir. 

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