Dalibor Talajić : « Sous la bannière de l’horreur, on peut faire passer en douce toutes sortes de problèmes de personnages. »

Le dessinateur de Hotell revient sur sa collaboration avec John Lees et sur sa façon d’aborder le genre horrifique.

For English speakers, please find lower the interview in its original version.


L’horreur sous toutes ses formes

Hotell est une mini-série d’horreur. L’horreur est-il un genre que vous aimez particulièrement dans les bandes dessinées, les romans, les films ?

Dalibor Talajić : Eh bien… je ne me suis jamais considéré comme un amateur d’horreur. Mais dès qu’il y a une opportunité de faire un livre d’horreur, je me lance. Après toutes ces années, je peux donc dire que c’est le genre que je comprends le mieux. C’est là où je me sens le plus libre. Et c’est vraiment un genre magnifique parce que sous la bannière de l’horreur, on peut faire passer en douce toutes sortes de problèmes de personnages. Et comme il est a priori classé X, tout est permis : n’importe quel thème, n’importe quel outil de narration… C’est vraiment le genre qui laisse le plus de liberté artistique.

Quelles sont les œuvres de ce genre qui vous ont inspiré ?

Dalibor Talajić : Bernie Wrightson est le maître ultime du genre. Gene Colan – ses mises en scène insaisissables et inquiétantes sont inégalées. Mike Mignola ajoute quelque chose de presque mélancolique à ses histoires. John Buscema a saisi les expressions faciales de ceux qui ont peur comme personne d’autre ne l’a fait…Nombreux sont mes héros…

Hotell – Scénario : John Lees – Dessin : Dalibor Talajić – Couleurs : Lee Loughridge

Dessin

Dans Hotell, il y a plusieurs types d’horreur : l’horreur graphique, l’horreur psychologique… Selon vous, quel est le type d’horreur le plus difficile à transmettre graphiquement en bande dessinée ? 

Dalibor Talajić : Psychologique, bien sûr ! Parce que vous êtes privé de tous les artifices habituels. Pas d’effets BOO, pas de gore, pas de monstres… Vous devez rendre une situation de vie ordinaire malaisée, inconfortable. C’est très, très difficile. Mais, une fois de plus, je me tourne vers les géants qui m’ont précédé pour obtenir de l’aide. Il y a un chapitre dans HOW TO DRAW COMIC BOOKS THE MARVEL WAY dans lequel Buscema montre différents angles de la même scène afin de renforcer l’effet dramatique. Cette page est à elle seule ma bible personnelle. Surtout pour ce genre de situations.

Quel est celui que vous aimez le plus dessiner ? 

Dalibor Talajić : Je les aime tous. Parce qu’ils offrent différents outils de narration. Mais l’horreur psychologique est le plus difficile. Et comme je ne peux pas refuser un bon défi…

Comment avez-vous travaillé avec John Lees sur les décors et la narration pour rendre les séquences vraiment terrifiantes ? Aviez-vous une grande liberté ?

Dalibor Talajić : John est très cool avec les artistes. J’ai tout de suite pu « voir » l’histoire. Et je pouvais facilement distinguer les variations de genre dans chacune des histoires d’Hotell. C’est un auteur précis et il sait ce qu’il attend de l’artiste, mais c’est aussi un homme très collaboratif et il est ouvert aux différentes solutions visuelles possibles pour ses idées. Travailler avec lui a donc été une véritable joie.

Hotell – Scénario : John Lees – Dessin : Dalibor Talajić – Couleurs : Lee Loughridge

Black Tape

Il y a quelques mois, vous avez commencé une nouvelle série, Black Tape, avec Dan Panosian pour AWA. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette série pour les lecteurs qui souhaitent s’y plonger ?

Dalibor Talajić : BLACK TAPE est (à nouveau) une histoire d’horreur sur une rock star du début des années 70 qui meurt soudainement au début dl’histoire. Sa jeune veuve apprend peu à peu l’existence d’une secte sataniste dont il était membre, et son intention d’utiliser son dernier enregistrement pour ouvrir les portes de l’enfer…
Dan a écrit un scénario amusant, un véritable hommage à cette époque. J’ai donné le meilleur de moi-même, et j’ai eu la chance d’avoir le fantastique Ive Svorcina comme coloriste.
Au moment où nous parlons, le TPB BLACK TAPE est sorti. Je ne saurais trop recommander ce livre !

Black Tape – Scénario : Dan Panosian – Dessin : Dalibor Talajić – Couleurs : Ive Svorcina

Projets et lectures

Avez-vous d’autres projets en cours ?

Dalibor Talajić : Je termine actuellement un livre sur une figure historique de la Croatie, Lea Deutsch. On pourrait la considérer comme une sorte d’Anne Frank croate. Et après cela… Eh bien… je ne peux dire qu’une chose : Pas de livre d’horreur cette fois-ci.

Quelles bandes dessinées lisez-vous en ce moment ? Des coups de cœur ?

Dalibor Talajić : Mes lectures dépendent de ce à quoi je me prépare. Si je vous le dis, vous devinerez sur quoi je travaille, et je devrai alors vous tuer… Nous sommes donc à nouveau dans le domaine de l’horreur.

Entretien réalisé par échange de mails. Merci à Dalibor Talajić pour sa disponibilité et sa grande gentillesse !


The Hotell artist looks back on his collaboration with John Lees and his approach to the horror genre.

 

Horror in all its forms

Hotell is  a horror mini-series. Is horror a genre you particularly like in comics? novels? films? 

Dalibor Talajić : Well… I ‘ve never seen myself as particularly a horror person. But whenever there’s an opportunity to do a horror book – I dive in. So, I guess, after all these years I can say that I understand this genre best. I feel most free within. And it truly IS a beautiful genre because under this banner of horror you can smuggle all sorts of character problems in. And since it’s a priori X rated – anything gioes : any theme, any storytelling tool… It truly does leave most artistic freedom.

What works in this genre have inspired you ?

Dalibor Talajić : Bernie Wrightson is the ultimate master of the genre. Gene Colan – his elusive and eerie misanscene is unsurpassed. Mike Mignola ads something almost melancholic to his stories. John Buscema caught   facial expressions of those in fear like noone else did…Many are my heroes…

Drawing

In Hotell, there are several types of horror: graphic horror, psychological horror… Which do you think is graphically the most difficult to convey in comics? 

Dalibor Talajić : Psychological, of course !
Because you are deprived of all the standard tricks. No BOO effects, no gore, no monsters… You have to make an ordinary life situation uneasy, uncomfortable. That is very, very difficult. However – again – I turn to the giants before me for help. There’s a chapter in HOW TO DRAW COMIC BOOKS THE MARVEL WAY in which Buscema demonstrates different angles of the same scene in order to boost the dramatic effect. That page alone is my personal bible. Especially for these kind of situations.

Which one do you enjoy drawing the most? 

Dalibor Talajić : I enjoy them all. Because they offer different story telling tool. But psychological horror is the most challenging. And since I can’t say no to a good challenge…

How did you work with John Lees on the designs and story-telling to make the sequences truly terrifying ? Was there a great deal of freedom for you ?

Dalibor Talajić : John is veeeeery artist friendly. I could «see » the story right away. And I could easily distinct the genre variation in each of the omnibus stories. He IS a precise writer and knows what he wants from the artist, but he is also a very collaborative guy and is opened to possible different visual solutions of his ideas. So to work with him was really a joy.

Black Tape

A few months ago, you began a new series, Black Tape, with Dan Panosian for AWA. Can you tell us a bit about this series for readers who want to jump on the bandwagon?

Dalibor Talajić : BLACK TAPE is (again) a horror story about a rock star from the early 70s who suddenly dies right at the beginning. His young widow than gradualy learns about a satanistic cul the was a member of, and about there plans to use his final recording to open the gates of hell…

Dan wrote a fun script, truly a love leter to that era. I gave my best here, and I was blessed to have the fantastic Ive Svorcina for the colorist.

As we are speaking BLACK TAPE TPB is out. I can’t recommend this book enough !!

Projects and readings

Do you have any other projects in the pipeline?

Dalibor Talajić : I am currently finishing a book about a historic figure in Croatia, Lea Deutsch. You might consider her something like Croatian Anne Frank.

And after that…Well… I can only say one thing : Not a horror book this time.

What comics are you currently reading? Any favorites?

Dalibor Talajić : My reading depends on wht I’m preparing myself for. So if I tell you, you’ll guess what I’m working on, and then I’ll have to kill you… So we’re in horror territory again.

Interview made by email exchange. Thanks to Dalibor Talajić for his availability and his great kindness.