L’artiste italien, que nous avons découvert grâce à La fleur de la sorcière publiée chez 404Comics, évoque son travail et la création de cette superbe bande dessinée !
For English speakers, please find lower the interview in its original version.
Travail dans la bande dessinée
De façon générale, comment abordez-vous votre travail dans la bande dessinée ?
Enrico Orlandi : Disons que j’aborde le travail différemment selon le rôle que je joue dans la bande dessinée. Quand je travaille en tant qu’auteur unique, comme dans le cas de La fleur de la sorcière, je décide d’abord ce que je veux raconter, en me laissant uniquement guider par le message que je veux que la BD transmette au lecteur. Ensuite, une fois que j’ai une « ligne » qui me conduit du début à la fin de l’histoire, j’essaie de me laisser influencer par l’atmosphère et les personnages, pour les enrichir de personnalité.
Votre travail s’inscrit dans le genre Fantasy. Pourquoi ce genre vous attire-t-il, tant en tant que lecteur qu’en tant qu’artiste et scénariste ?
EO : C’est un genre auquel je suis très attaché, j’ai commencé enfant à lire le seigneur des anneaux et à partir de là je n’ai jamais arrêté. Évidemment, il y a des hauts et des bas dans la littérature fantastique, mais je pense que c’est un genre dans lequel on peut raconter à peu près n’importe quoi, en recombinant ou en déformant ses composants pour les utiliser comme métaphore du monde réel.
La fleur de la sorcière
Comment est né le projet de La fleur de la sorcière ?
EO : Lorsque j’ai créé la Fleur de la sorcière, j’ai ressenti le besoin de raconter un autre type de héros, qui finit par découvrir que ce que nous voulons est aussi la bonne chose pour nous. J’étais également passionné par la culture Sami et en lisant leur mythologie, j’ai trouvé les éléments dont j’avais besoin pour raconter l’histoire de Tami.
La fleur de la sorcière est une bande dessinée destinée à un large public. Pourquoi ce choix ? Qu’est-ce que cela vous permet de raconter que vous ne pourriez pas faire dans un registre spécifiquement adulte ?
EO : La fleur de la sorcière raconte le voyage d’un enfant qui devient un homme, je voulais donc que quiconque lise le livre puisse retrouver une partie de son chemin dans celui de Tami. En dehors de cela, je suis un fan de la littérature pour enfants et je pense que mon style de dessin leur convient mieux.
La fleur de la sorcière peut séduire les plus jeunes avec une histoire épique et chargée de valeurs, mais aussi les plus aguerris avec un récit sur le passage à l’âge adulte. Est-ce cette double lecture qui est la plus difficile à mettre en place en tant que scénariste ?
EO : Je pense qu’on peut parler aux enfants de pratiquement tout, l’important c’est la manière de le faire et les mots qui sont utilisés. Cela dit, ce n’était pas facile, car ce qui passionne les enfants peut être indifférent aux adultes et vice versa. Il faut un bon équilibre, peut-être que le fait d’être moi-même encore en chemin m’a aidé, comme Tami.
Pour La fleur de la sorcière, vous avez créé un univers riche avec ses traditions tant sur le plan graphique que sur le plan scénaristique pour contextualiser l’histoire de Tami. Comment avez-vous construit cette bande dessinée ? D’abord en imaginant l’univers et ensuite l’intrigue ? L’inverse ? Les deux en parallèle ?
EO : La première chose que j’ai imaginée pour la Fleur de la Sorcière était un petit guerrier encapuchonné avec une cape rouge faisant face à un énorme monstre au milieu d’une tempête de neige. A partir de là, en découvrant le message que je voulais raconter et en me plongeant dans les légendes Sami, tout s’est enchaîné. Je pense être un conteur principalement visuel, ce qui m’a causé beaucoup de difficultés dans le traitement du dernier livre sur lequel j’ai travaillé, La lionne de Dordona, auquel j’ai collaboré en tant que scénariste.
L’un des principaux thèmes de La fleur de la sorcière est l’apprentissage et la construction de la personnalité. Qu’est-ce qui vous intéresse dans ce thème ?
EO : Ce qui m’intéresse, c’est que nous, en tant qu’adultes, sommes le fruit de ce que nous étions enfants, de notre environnement, de nos parents, etc. S’il y a un objectif que nous voulons atteindre, je pense qu’il est important de comprendre quel chemin nous suivons et pourquoi nous le poursuivons, peut-être que ce pour quoi nous luttons tant n’est pas vraiment ce que nous voulons pour nous, mais peut-être que c’est juste ce que nous pensons devoir conquérir parce que la société nous en a convaincu. Je pense que ce sont des choses importantes à découvrir
Art
Comment travaillez-vous sur le plan technique ? Exclusivement en numérique ?
EO : La Fleur de la sorcière a été dessinée au crayon, puis colorisée numériquement. Maintenant je travaille exclusivement en numérique, rien de futuriste de toute façon, j’ai une vieille intuos de 2009, de temps en temps elle fait une crise, mais elle fait son devoir.
Quels sont les points sur lesquels vous aimez travailler graphiquement ? L’expression des personnages ? Les décors ? L’élaboration de l’univers ?
EO : A l’époque de la Fleur de la Sorcière je détestais travailler sur les décors, et je préférais me concentrer sur les expressions des personnages. Cependant durant ces années-là, j’ai beaucoup étudié les décors et maintenant j’aime vraiment y consacrer du temps, j’espère que cela se percevra dans mes prochains travaux.
Autres questions
Quels sont vos autres projets en matière de bande dessinée ?
EO : Il y a quelques mois, un livre sur lequel j’ai travaillé en tant que scénariste est sorti en Italie, La Leonessa di Dordona. En ce moment, je travaille, en tant que dessinateur, sur une bande dessinée fantastique pour enfants pour Dupuis, mais nous en sommes encore au début et je ne peux pas vraiment en parler.
Quelles sont les bandes dessinées que vous lisez actuellement ? Des coups de coeur ?
EO : En ce moment, je suis deux bandes dessinées, évidemment fantastiques, l’une est Voro, publiée par Casterman, tandis que l’autre est un manga, The witch hat.
Entretien réalisé par échange de mails. Merci à Enrico Orlandi pour sa disponibilité et sa gentillesse.
The Italian artist, whom we discovered thanks to The Witch’s Flower published by 404Comics, talks about his work and the creation of this superb comic book!
Work in comics
Generally speaking, how do you approach your work in comics?
Enrico Orlandi : Let’s say that I approach work differently depending on the role I have in the comic. When I work as a sole author, as in the case of Fiore della Strega, I first decide what I want to tell, only by letting myself be guided by the message that I want the comic to get to the reader. Then, once I have a « line » that takes me from the beginning to the end of the story, I try to be influenced by the atmosphere and the characters, to enrich them with personality.
Your work is in the Fantasy genre. Why does this genre appeal to you, both as a reader and as an artist and writer ?
EO : It is a genre to which I am very attached, I started as a child reading the lord of the rings and from there I have never stopped. Obviously there are ups and downs of fantasy literature, but I think it’s a genre in which you can tell pretty much anything, recombining and or twisting its components to use them as a metaphor for the real world.
The witch’s flower
How was the project of The Witch’s flower born?
EO : When I created the Flower of the Witch I felt the need to tell a different kind of hero, one eventually discovers that we want is also the right thing for us. I was also passionate about the Sami culture and reading their mythology I found the pieces I needed to tell the story of Tami.
The witch’s flower is a comic book for a large audience. Why this choice? What does it allow you to tell that you could not do in a specifically adult register?
EO : The Flower of the Witch tells of a child on a journey to become a man, so I wanted anyone who read the book to be able to find part of his path in Tami’s. Other than that I am a fan of children’s literature and I believe my drawing style is more suitable for them.
The witch’s flowercan seduce the youngest with an epic and value-laden story, but also the most seasoned with a story about the passage to adulthood. Is it this double reading that is the most difficult to put in place as a scriptwriter?
EO : I think that children can be talked about practically everything, the important thing is the way in which it is done and the words that are melted. That said it was not easy, because what children are passionate about could be indifferent to adults and vice versa. You need a good balance, maybe it helped me that I am still on my journey myself, like Tami.
For The witch’s flower, you have created a rich universe with its traditions both graphically and scripturally to contextualize the story of Tami. How did you build the comic? First by imagining the universe and then the storyline? The other way around? Both in parallel?
EO : The first thing I imagined of the Flower of the Witch was a little hooded warrior with a red cloak facing a huge monster in the middle of a snowstorm, from there then, discovering the message I wanted to tell and immersing myself in the Sami legends it all came the rest. I think I’m a mainly visual storyteller, which is what caused me a lot of difficulties in dealing with the last book I worked on, The Lioness of Dordona, in which I collaborated as a screenwriter.
One of the main themes of The witch’s flower is learning and the construction of personality. What interests you in this theme?
EO : The thing that interests me is that we, as adults, are the fruit of what we were as children, of our environment, of our parents etc. If there is a goal we want to reach, I think it is important to understand what path we are following and why we are pursuing it, perhaps what we are struggling for so much is not really what we want for us, but maybe it is just what we think we should conquer because society has convinced us of it. I think they are important things to discover
Art
How do you work technically? Exclusively in digital?
EO : The Witch’s Flower was drawn in pencil and then digitally colored. Now I work exclusively in digital, nothing futuristic anyway, I have an old intuos from 2009, every now and then she has a tantrum, but she does her duty.
What are the points you like to work on graphically? The expression of the characters? The scenery? The elaboration of the universe ?
EO : At the time of the Flower of the Witch I completely hated working on the backgrounds, and I preferred to concentrate on the expressions of the characters. However in these years I have studied the backgrounds a lot and now I really enjoy making them, I hope that it will be perceived in my next works.
Others questions
What are your other projects in comics?
EO : A few months ago a book in which I worked as a writer came out in Italy, La Leonessa di Dordona. At the moment I’m working, as a designer, on a fantasy comic for kids for Dupuis, but we are still in the beginning and I can’t really talk about it.
What comics are you currently reading? Any favorite ones ?
EO : At the moment I’m following two comics, obviously fantasy, one is Voro, published by Casterman, while the other is a manga, The witch hat atelier. They both have beautiful atmospheres.
Interview made by email exchange. Thanks to Enrico Orlandi for his availability and his kindness !