Après les très bons Rick and Morty et The Few, dans des genres différents, Invisible Republic est la troisième sortie de Hi Comics.
2843, le régime d’Arthur McBride vient de tomber. Cet ancien révolutionnaire est arrivé au pouvoir par les armes et la violence. Un journaliste tombe par hasard sur un ancien journal tenu par la cousine de McBride. Problème, personne n’a jamais entendu parler d’elle. Pourrait-elle livrer des révélations sur le passé de son cousin ?
Le couple Gabriel Hardman et Corinna Beckho place son thriller politique dans un futur où règne le chaos, un monde sombre et violent, où chacun ne doit compter que sur lui-même, la principale préoccupation des individus étant de survivre. Au début du récit, en 2843 sur Avalon, lune-colonie, Croger Babb, un journaliste découvre par hasard un journal rédigé par la cousine de McBride, sur lequel elle semble révéler des faits inconnus. Puis on bascule en compagnie de ce dernier et de sa cousine cherchant à échapper aux soldats du régime…42 ans plus tôt. Deux temporalités, deux teintes graphiques distinctes. Le récit va se construire sur ces deux plans alternant passé et présent. Habile mise en place qui va permettre un rythme haletant, sans temps mort. Chaque époque nous fournit les informations nécessaires à la reconstitution du portrait de McBride, fascinant dirigeant, plus nuancé et trouble qu’il n’y paraît au premier abord. Car c’est à lui que s’intéressent Hardman et Beckho. Son ascension puis sa chute, que l’on sait irrémédiable, dressées par petites touches.
Deux personnages « secondaires » sont développés : Maia, la cousine de Mc Bride et le journaliste Croger Babb. Le portrait de Maia présente une femme en proie au doute, qui s’interroge sur son cousin dont l’attitude ambiguë la perturbe, mais également déterminée à s’en sortir et assez touchante par moments. On a de l’empathie pour cette femme à la fois forte et fragile. A travers elle, les auteurs s’interrogent sur la façon de combattre un pouvoir violent et tyrannique : faut-il y répondre également par la violence et le combat ? De son côté, le journaliste Croger Babb est un homme à la dérive, séparée de sa femme, à la recherche d’un scoop pour relancer sa carrière. Il est relativement froid et calculateur. A travers lui, les auteurs s’intéressent au rôle des lanceurs d’alertes. L’ensemble forme une série de questionnements moraux salutaires et bien orchestrés.
Gabriel Hardman a un trait détaillé, fin et précis. Il travaille les expressions des personnages ainsi que la mise en page, variant les découpages et les perspectives. Les scènes d’action sont dynamiques et réalistes. Le contraste des tons choisis par le coloriste pour les deux époques, le passé teinté d’orange plus chaud où l’espoir était encore possible, le présent teinté de gris où le pessimisme est omniprésent, est très efficace et traduit bien les ambiances. La partie graphique donne clairement une force supplémentaire au récit. Le parallèle avec Lazarus fait sur la quatrième de couverture est vrai pour le récit thriller futuriste mais aussi pour les styles graphiques assez proches.
A la fin du tome, le portrait de McBride semble plus net pour le lecteur mais le cliffhanger d’une imparable efficacité pourrait tout remettre en question ! 4 tomes sont prévus, de quoi faire évoluer les choses !
L’édition de Hi Comics est de très bonne facture, incluant des bonus tels des couvertures, des réflexions de C. Beckho ainsi qu’une courte bio des auteurs.
Invisible Republic est un titre captivant, bien construit et bien dessiné. Sans doute le meilleur titre sorti par Hi Comics pour le moment. Vivement la suite !